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Premier à avoir connu un ajustement de prix, le marché immobilier britannique est prêt à rebondir et devance déjà l’Europe continentale

Papier d’opinion de Henry Timmis, co- directeur du Royaume-Uni – Real Estate, chez Sienna Investment Managers

Le Royaume-Uni a-t-il atteint le creux de la vague ?

Le secteur immobilier au Royaume-Uni a connu une correction bien plus rapide que celui de l’Europe continentale. Cette correction a été entamée dans un contexte politique compliqué en 2002 lors du vote du Budget et soutenu par une augmentation agressive des taux d’intérêt par la Banque d’Angleterre, qui sont passés de 0,1 % à 5,25 %, dans le but de maîtriser l’inflation.

Un certain nombre de fonds immobiliers britanniques a été confronté à des demandes de retrait importantes, les obligeant à vendre leurs actifs les plus qualitatifs et donc les plus liquides.  Bien que les ventes sous administration judiciaire n’aient pas été si nombreuses, les rares transactions se sont faites avec une importante décote dans un contexte de baisse importante des transactions.

Depuis deux ans, les principaux acheteurs ont été des investisseurs privés, locaux et internationaux, souvent déjà présents sur le marché britannique. Les investisseurs institutionnels français ont également été actifs, attirés par les rendements plus élevés et la profondeur du marché. Chez Sienna IM, nous accompagnons un certain nombre de ces investisseurs et, à ce titre, nous avons été en mesure de tirer parti de cette situation, en achetant des hôtels de grade institutionnel long terme à près de 6 % de rendement initial net, ou des immeubles mixtes dans la City de Londres à 7,5 % de rendement initial net, lorsque les loyers ont été réévalués à suite de l’épidémie du covid. Nous assistons aujourd’hui à une croissance des loyers et nous recherchons activement d’autres investissements de cette qualité à travers le Royaume-Uni, bien que la concurrence commence à s’intensifier.

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Au cours des deux derniers mois, quelques investisseurs institutionnels britanniques ont pu profiter de l’évolution des prix, ciblant des actifs « core » avec des rendements « core+ » , profitant ainsi de la compression actée des rendements. A titre d’exemple, le taux prime de la City de Londres est passé d’un pic de 3,75 % au premier trimestre 2022 à 5,25 % actuellement.

L’augmentation progressive du nombre d’acheteurs sur le marché devrait renforcer la confiance des propriétaires dans leur décisions de vente.

Quelles tendances voyez-vous se dessiner sur les marchés ?

L’un des principaux changements survenus sur les marchés en 2022 a été l’augmentation substantielle des coûts d’emprunt au Royaume-Uni. Les taux de swap à 5 ans sont passés d’un minimum de 0,16 % (juillet 2022) à un maximum de 5,67 % (septembre 2022) et, de ce fait, le crédit n’a pas progressé. Le nombre d’acheteurs a considérablement diminué.

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Nous assistons aujourd’hui à une baisse des taux d’intérêt, celui de la Banque d’Angleterre ayant diminué de 50 points de base par rapport au récent pic de 4,75 % (4,34 % pour le swap à 5 ans). Si l’on ajoute à cela les évolutions au niveau des prix (par exemple, les taux de rendements des bureaux en province ont augmenté de 225 points de base, passant de 4,75 % à 7,00 %), l’endettement commence à devenir rentable, favorisant un regain de confiance.

Du côté des locataires, la demande portant sur des immeubles nouvellement construits ou rénovés dans les centres-villes, avec de solides références en matière d’environnement reste soutenue. Pour les bureaux de haute qualité, la croissance des loyers a été bonne et devrait le rester, ce qui est en partie dû à une offre limitée. Les coûts de construction élevés des dernières années, combinés à une incertitude sur les valeurs à la revente, ont freiné le développement de nouveaux projets.

Le commerce de détail est également un marché intéressant. Les rues commerçantes du Royaume-Uni avaient souffert pendant quelques d’années, mais à la suite de la crise, les loyers et les taxes locales ont chuté de façon spectaculaire, ce qui a permis aux locataires d’exercer leur activité à un prix plus abordable. Dans les rues centrales, on constate une forte concurrence pour les nouveaux emplacements et, par conséquent, une croissance des loyers. Les rendements « prime » sont actuellement de 6,50 %, après avoir atteint un pic de 7 % en 2023.

Quels sont les principaux risques?

Inévitablement, le principal risque réside concerne les tendances macroéconomiques globales qui auront un impact non seulement sur le Royaume-Uni mais aussi sur le reste de l’Europe, qu’il s’agisse des guerres en cours ou du nouveau gouvernement américain.

Là où le marché a encore du mal à trouver ses marques, c’est avec les opportunités avec création de valeur (« value-add »). Il est probable que les propriétaires n’ont pas pleinement apprécié l’impact des coûts de construction sur la valeur de leur projet et, dans certains endroits, il faudra du temps pour y remédier. Par exemple, la majorité de nos acquisitions d’investissement en 2024 ont été réalisées à un prix inférieur à la valeur de remplacement, ce qui pose évidemment la question des montants de location et des rendements à atteindre pour assurer la viabilité. Ces incertitudes pourraient entraîner quelques ventes « forcées », notamment pour les actifs situés dans des emplacements secondaires.